Histoire du Système d'échange local (lundi, 04 mai 2009)

Historique des SEL
publié le mercredi 11 février 2004 sur le  site internet de selidaire www.selidaire.org

Dans les années 80, Michael LINTON, écossais vivant dans une région touchée par la crise (l’île de Vancouver à l’extrême ouest du Canada), frappé de voir autant de gens doués de savoir-faire, réduits à l’inactivité du fait d’un manque d’argent, se mit en tête de rationaliser un autre moyen d’échange utilisé localement : le troc. Il inventa le L.E.T.S. : LOCAL EXCHANGE TRADING SYSTEM.
Au Canada, en Australie, puis en Grande Bretagne, aux Pays Bas .. l’idée s’est propagée ; ces réseaux regroupent en Grande Bretagne plus de 20 000 personnes au sein de quelques 300 groupes ; les premiers L.E.T.S. ont pris naissance dans des quartiers pauvres de villes parsemées de friches industrielles mais les L.E.T.S. aujourd’hui gagnent les campagnes. En ces temps de chômage structurels, d’exclusion, de mise à la retraite anticipée, de contrats au rabais et de travail à mi-temps, on comprend que les L.E.T.S. connaissent une expansion rapide (voir la rubrique "liens" - Sel de France et Sel du Monde").
Le premier SYSTEME D’ECHANGE LOCAL Français a vu le jour en Ariège en Octobre 1994, et comptait, en 1996, 380 adhérents. D’autres SEL sont nés depuis dans presque tous les départements de France, on en compte aujourd’hui près de 350 (voir la rubrique "liste des SEL").

I.2 - Les origines du SEL

Les monnaies locales, régionales ou urbaines, étaient presque universelles avant le dix-neuvième siècle et la centralisation générale du système bancaire. Il était normal de les utiliser pour le commerce local, parallèlement à diverses monnaies à valeur nationale. Ce système financier permettait aux villes et régions de maintenir leur cohésion et leur sécurité économiques tout en prenant part aux échanges internationaux.
En Europe, de nombreuses expériences ont été réalisées au sortir des deux guerres mondiales. Aujourd’hui, il existe un peu partout de nombreuses catégories d’échanges : les réseaux d’échange de savoir ; le troc traditionnel, les « barter system », les coups de mains entre amis, voisins ou parents, etc.
De ces nombreuses origines, souvent anciennes, est né le SEL ou plutôt le LETS (SEL en anglais) puisqu’il a commencé dans les pays anglo-saxons.
Aux Etats-Unis, les années 60 et 70 ont vu de nombreuses expérimentations sociales, comme des systèmes d’échanges de savoirs et des réseaux de baby-sitting.
Dans les années 70, la région de Vancouver, au Canada, avec la fermeture de l’industrie minière qui avait provoqué une augmentation du chômage, connaissait un fort mouvement communautaire..
En 1976, dans la ville, puis sur l’île de Vancouver, David Weston lance un système d’échange appelé Community Exchange (échange communautaire), fondé sur le temps. Inspiré par cette idée, Michael Linton démarre, toujours sur l’île de Vancouver, un système d’échange fondé cette fois sur le Green Dollar (dollar vert), qui a une valeur équivalente au dollar canadien. Il appelle ce système Local Exchange Trading System ou LETS (Système d’échange et de commerce local). Il réalise un logiciel informatique de gestion des échanges et crée une entreprise, Landsman Ltd., pour mettre en place un système expérimental. Dans le même temps, d’autres systèmes se développent, comme celui de David Weston devenu le Green Dollar Exchange
(Echanges en dollars verts)
Le LETS de Michael Linton se développe très vite, mais deux ans plus tard, il s’effondre : direction unique, participation insuffisante des adhérents, abus de certaines personnes qui s’endettent trop lourdement, système pas assez transparent, irréalisme de Linton qui a vu trop grand …Bref sur les 25 LETS lancés au Canada, la moitié fonctionne à peine en 1992.
En Australie, Jill Jordan diffuse le concept du LETS et son nom. Et ça marche ! 45 LETS en 1991, 200 en 1994, dont Blue Mountain, le plus gros LETS au monde avec 1800 adhérents.
Ces LETS, gérés collectivement, reprennent de nombreuses caractéristiques des Green Dollar Exchange, comme les bons d’échange. Certains posent des limites au débit. En fait chaque groupe redéfinit le système à sa convenance, introduisant une grande variété de fonctionnements. A partir de 1984, David Weston introduit ses idées en Grande Bretagne et le premier LETS britannique démarre à Norwich en 85.
L’aggravation de la récession économique, la publication d’un livre sur les LETS, et l’intérêt des médias favorisent le développement du mouvement.
En 1991, Liz Shephard lance Letslink UK, réseau de LETS et agence de développement.
Il y a aujourd’hui au moins 600 LETS en Grande Bretagne.
En France, Richard Knights du LETS de Totnes, de Grande-Bretagne, donne une conférence

DU SEL DANS LE MONDE

SEL Mode d’emploi

Des LETS et des SEL se sont développés dans de nombreux pays : en Europe (Hollande, Allemagne, Italie, Belgique, Espagne..), en Amérique du nord et du sud, au Japon, en Afrique (Sénégal, Côte d’Ivoire)

I.3 Qu’est-ce qu’un SEL?

Le SEL est un groupe de personnes qui mettent des services, des savoirs et des biens à la disposition les unes des autres, au moyen d’une unité d’échange choisie par les membres.
J’offre à mon voisin la mobylette qui ne me sert plus, il garde les enfants d’un autre qui donne quelques cours d’informatique à mon fils...
En ville, par ces temps de chômage structurel, de nombreuses personnes manquent d’argent pour acheter ce dont elles ont besoin. A la campagne, néo-ruraux et retraités sont à la recherche de savoir-faire et de convivialité. Ils aiment échanger avec les anciens et ceux qui veulent conserver ou faire revivre des traditions. Toutes ces personnes disposent de temps, de compétences et de produits qu’elles ne peuvent pas mettre sur le marché. Entre elles, elles échangent grâce à une unité de mesure qu’on peut considérer comme une monnaie virtuelle et locale ou comme des reconnaissances réciproques de dettes, compensables entre adhérents du SEL.
Ce système local, dont il existe de nombreux exemples en France et à l'étranger, est ouvert à tous, riches ou pauvres en euros. Il favorise la prise de conscience des problèmes locaux et mondiaux, la revitalisation de l’économie locale sans apport de capitaux, une économie de transport et de gaspillage de produits, le resserrement des liens de proximité, la lutte contre la précarité et l’exclusion...


Quelques questions

Mais c’est du troc
Pas du tout. Dans le troc, deux personnes échangent au même moment deux choses qui ont à peu près la même valeur. Dans le SEL, l’unité d’échange permet de transférer, à différentes personnes et différents moments, des services, des savoirs ou des biens qui ont des valeurs différentes.

Qui fixe la valeur ?
Souvent le SEL recommande une valeur de 1 grain par minute de travail. Dans certains SEL les services sont directement comptés en minutes et heures. Mais, en fin de compte, le montant d’une transaction est toujours fixé de gré à gré entre deux adhérents.

Ce n’est pas grave d’avoir un compte SEL en négatif ?
Pas du tout. Dans la plupart des SEL, chacun commence avec un compte à zéro. Si j’ai versé 800 grains de Sel pour la guitare de Denis, son compte devient positif mais le mien, négatif,remontera au fur et à mesure que j’écoulerai mes confitures de banane à 10 grains le pot. Ainsi, dans un SEL, il y a nécessairement des adhérents qui ont un compte négatif, et d’autres un compte positif. La somme de tous les montants de tous les comptes est égale zéro

On peut rester dans le négatif indéfiniment ?
La plupart des SEL ont mis des limites : par exemple entre - 2000 et + 2000 grains. Si un adhérent atteint cette limite, on lui rappelle les règles

Qu’est-ce qui m’empêche de partir avec un compte négatif ?
Un débit constitue un engagement à rendre au groupe des biens, des services, ou des savoirs. Or, dans le SEL, entre les personnes qui se rencontrent et font connaissance naît la confiance en même temps que l’engagement moral. En pratique, ça suffit pour que ce genre de comportement irresponsable soit très rare.

Quelle garantie a-t-on sur la qualité des biens ou des services proposés?
Aucune. C’est aux adhérents de discuter, pour savoir si l’un a le niveau de qualification que souhaite l’autre ou ce qui se passe si l’objet
tombe en panne le lendemain, afin de se mettre d’accord avant l’échange. Pas de solution toute faite, ça passe par la discussion et la confiance.
En cas de problème, le C.A. (Conseil d’Administration ou Conseil d’Animation) du SEL peut proposer un médiateur.

Les grains de SEL et les euros, c’est pareil ?
Non, car, pour dépenser des euros, il faut d’abord en posséder. Alors qu’avec un compte à zéro je peux échanger tout de suite.
Non, parce que les grains ne sont pas convertibles en euros, ni les euros en grains.
Non, car il s’agit d’une monnaie locale sans utilisation en dehors de l’association.
Non, car cette monnaie locale n’est pas capitalisable, ne produit pas d’intérêts et n’est donc pas spéculative

Mais c’est du travail au noir ?
Non, il s’agit d’une entraide entre adhérents, pour des coups de main « ponctuels, non répétitifs et de courte durée ». En revanche un professionnel doit déclarer en euros son revenu en grains, et payer la TVA. Par exemple, si je suis garagiste, je peux aider quelqu’un à repeindre sa cuisine sans rien déclarer, mais si je répare sa voiture, je dois le déclarer.
La pratique montre qu’énormément d’échanges qui n’auraient pas pu voir le jour dans le cadre classique du marché se font au sein des SEL.
D’ailleurs, même si Marie demande à Bernard de l’aider à retapisser son appartement parce que ses fins de mois sont difficiles, c’est un autre artisan
ou commerçant qui bénéficiera de l’argent économisé par Marie. Plus il y a de convivialité et de rencontres, plus il y a d’échanges, plus se créent des liens de proximité, entraînant de nouveaux échanges.
De plus, les adhérents d’un SEL continuent, dans leur vie quotidienne, à gagner et dépenser de l’argent, à payer des impôts directs et indirects : le SEL n’est qu’un à-côté de l’économie actuelle.
Mais moi je n’ai rien à proposer !
C’est ce que dit tout le monde! Ce que vous pouvez proposer ne vous paraît pas intéressant, s’il n’est pas compté comme travail salarié en euros. Pourtant chacun possède une richesse à donner aux autres : faire de la pâtisserie, du bricolage, proposer les noix de son jardin, raconter des histoires aux enfants, écouter celui qui a un gros coup de cafard. Tout le monde, enfants, retraités, chômeurs, a quelque chose à proposer. Il suffit d’être à l’écoute de ses différences.
C’est fou ce qu’on peut découvrir alors comme nouveaux échanges quand on est à l’écoute de ses différences.

Écrit par Prele Provence | Lien permanent | Commentaires (0) |  Imprimer |  Facebook |